En guise de préface…
Publié anonymement en 1695, le libelle L'Alcoran de Louis XIV, ou le testament politique du Cardinal Jules Mazarin a été rédigé dans les dernières années de la Guerre de la Ligue d'Augsbourg (1688-1697), un conflit qui opposa la France à une coalition de princes protestants. Bien que l'on ait attribué ce texte à Courtilz de Sandras, Jean Lombard a remis en doute cette possibilité et a proposé comme auteur un réfugié vivant en Hollande.
L’Alcoran de Louis XIV reflète l’esprit burlesque qu'a adopté la critique anti-louisquatorienne des années 1690. Le texte exploite la plasticité du dialogue des morts, sous-genre du dialogue que la publication des Dialogues des morts tant anciens et des modernes de Fontenelle en 1683 avait remis à la mode. Le pamphlétaire fait discuter les ombres de Jules Mazarin, l'ancien ministre de Louis XIV, et du Pape Innocent XI, l'un des ennemis politiques du Roi Soleil.
Le pamphlétaire puise d’une part dans des lieux communs pour condamner Louis le Grand : par la bouche de ses personnages, l'auteur reproche au monarque français son machiavélisme, son ambition démesurée, sa persécution des huguenots et son alliance avec l’Empire Ottoman face à la maison d’Autriche, fustigée comme une véritable trahison de la chrétienté. D’autre part, ce pamphlet exploite les possibilités du dialogue pour railler de manière innovante la politique despotique de Louis XIV. Il met notamment en scène la récitation par le roi d’un faux catéchisme, « L’Alcoran », avec lequel Mazarin aurait endoctriné le jeune monarque. Le jeune roi récite ainsi une doctrine explicitant son machiavélisme ainsi que son ambition de régner « à la Turque ».